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Les sacrifices

Eléments très importants de la vie cultuelle des peuples de Catchaluk, les sacrifices sont au cœur de la plupart des pratiques. Presque uniquement exercés par des prêtres et chamans, ou sous leur supervision, ils ont une très grande importance et sont fortement connotés positivement par tous les peuples. 

Le rôle des sacrifices

Si dès lors que l’on parle de sacrifice le rôle le plus mis en avant est celui de nourrir les dieux, dans les fait les choses sont plus subtiles et complexes. En effet l’acte du sacrifice mais aussi tout le cérémoniel qui l’entoure poursuit en réalité tout un ensemble d’objectifs plus ou moins distincts les uns des autres certains à des fins cultuelles et religieuses d’autres à des fins plus politiques.

Les objectifs religieux

L’acte de sacrifice est avant tout perçu comme un acte à caractère cultuel même si le politique et le religieux sont intimement liés. De ce point de vue les cérémonies de sacrifices revêtent deux principales raisons :

-nourrir les dieux : il s’agit ici de l’une des principales et plus simples raisons. Les diverses divinités sont des êtres mortels ayant besoin de ces sacrifices pour survivre et donc faire perdurer le monde. Par l’acte de sacrifice, le prêtre va ainsi permettre au monde de perdurer. 

-répéter des mythes : un autre point bien moins compris du sacrifice et plus généralement de l’ensemble du rite sacrificiel est que ce dernier n’est généralement pas un acte isolé dénué de symbolisme. En effet, bon nombre de cérémonies sacrificielles reproduisent de manière symbolique des éléments mythologiques. Cela peut passer par la manière de tuer, ce qui est tué, les vêtements, les paroles, le lieu… Le rite va ainsi reproduire sur terre un évènement fondateur et structurant et par là il leur redonne vie. En faisant ainsi, le rite permet de le revigorer et souvent de redonner symboliquement vie aux personnages qui s’y trouvent (le prêtre occupe alors souvent le rôle d’une divinité). Le rite sacrificiel permet ainsi de s’assurer que l’on poursuive la marche du monde.

-un échange : le rite sacrificiel est enfin vu comme une forme d’échange. Ce n’est pas un don aveugle ou une marque de dévotion, il n’est d’ailleurs pas nécessaire d’être particulièrement dévot pour être prêtre. Le fait de faire un sacrifice est aussi vu comme un moyen d’obtenir quelque chose en échange. Si cela est évident lors de certains rites sacrificiels « magiques », aucun sacrifice n’est fait gratuitement. Par un sacrifice à un tehcualt on espère éloigner la maladie et favoriser les récoltes, par un sacrifice à un patchama maintenir la marche du monde etc… 

En revanche un sacrifice n’est jamais vu comme un moyen de remercier pour quoique ce soit. Parfois après un grand bienfait on fait parfois un sacrifice non pour remercier mais pour payer une dette (on a peur des conséquences si on ne le fait pas).

Objectifs politiques

Au-delà de ses aspects religieux de maintien de l’ordre du monde, les rites sacrificiels jouent un rôle majeur du point de vue politique.

 

-s’assimiler à la marche cosmique : par le fait de pourvoir aux sacrifices, les dirigeants s’inscrivent directement dans le maintien de l’univers même sans y participer. De plus les rites sacrificiels importants sont toujours publics et souvent toute la population d’une ville y assistera. Ceci permet ainsi aux dirigeants (qui seront souvent nommés par le prêtre comme celui ayant amené les sacrifices) d’asseoir leur pouvoir et d’être vus (mais aussi se percevoir) comme ceux qui préservent le monde. Certains dirigeants vont aussi plus loin en participant directement à certains grands rites par la pratique de saignées rituelles. C’est notamment le cas des notchapas zacoalts. Parfois cela passe un sacrifice d’un proche (souvent un enfant) du dirigeant ce qui produit un effet similaire.

 

-montrer sa puissance : autre intérêt des rites sacrificiels pour le pouvoir, ces derniers peuvent, lors des évènements majeurs, permettre de montrer leur puissance. Ceci peut passer par deux moyens et deux cibles différentes mais c’est avant tout le nombre qui importe. D’un côté sacrifier de nombreux « étrangers » capturés lors de raids ou à la guerre permet d’asseoir son autorité sur son propre peuple et de passer pour un dirigeant compétent d’un point de vue militaire. D’un autre côté sacrifier de nombreuses personnes du peuple duquel il est à la tête permet de faire passer l’idée que le peuple est tellement nombreux (et donc étendu) qu’il est possible pour le dirigeant d’en sacrifier un grand nombre sans soucis. Ceci reste assez rare mais peut se faire lorsque des dirigeants d’autres puissances sont invités.

 

-marquer une victoire : en cas de victoire militaire, il arrivera que l’on sacrifie les dirigeants vaincus ainsi que ces chefs militaires. L’intérêt politique est ici de se débarrasser de tout élément gênant et ainsi d’asseoir son pouvoir directement ou non. Cela permet aussi d’envoyer un message à d’autres puissances ou vassaux en invitant leurs représentants à la fête où aura lieu le sacrifice.

 

-cas de guerre : dans certains cas le besoin de nombreux sacrifices peut être une bonne excuse pour déclencher une guerre ou un conflit. Ainsi sous prétexte d’une catastrophe naturelle, d’une mauvaise récolte, etc… certains dirigeants peu regardants pourront justifier avoir besoin de sacrifices pour nourrir les dieux. Cette excuse fait cependant rarement illusion mais reste plus acceptée que la simple volonté d’agrandir son territoire pour obtenir certaines ressources.

 

-se débarrasser de personnes indésirables : c’est surtout le cas chez les paretches atlecs et au sein de la noblesse zacoalte. En cas de conflits politiques majeurs, il peut être intéressant pour un dirigeant de faire en sorte que des opposants soient sacrifiés (volontairement ou suite à des accusations pour de faux prétextes). Le rite étant public, ceci permet d’envoyer un message clair à tout opposant.

La part des sacrifices

Si les sacrifices sont un élément important de la culture et des pratiques religieuses, il est important de les remettre en perspective. S’ils sont d’un côté très communs dans les grandes villes ont l’on fait plusieurs sacrifices humains par an et des sacrifices de petits animaux tous les jours, dans de petits villages isolés, les sacrifices humains sont extrêmement rares  et l’essentiel des sacrifices est composé de petits animaux. De même le peuple déterminera aussi souvent la fréquence et la nature des sacrifices. Voici un ordre d’idée de la moyenne des sacrifices selon le lieu pour les huitzes, yapanecs, mapanitls, toxcecs et iktomis. Ces chiffres peuvent être multipliés par 3 pour les atlecs, aweches et pochtans:

Pour une grande ville (plus de 100.000 habitants)

-humains : 7 à 21 par an (hors conflits majeurs)

-grands animaux : 10 à 30 par mois

-petits animaux : 20 à 50 par semaine

(x2 à x4 au sein des villes atlèques)

 

Pour une petite ville (5.000 à 10.000 habitants)

-humains : 1 par an

-grand animaux : 2 à 10 par mois

-petits animaux : 7 à 14 par semaine

 

Pour un village (500 à 800 habitants)

-humains : 1 tous les 3 à 5 ans

-grands animaux : 2 à 4 par mois

-petits animaux : 3 à 7 par semaine

Les types de sacrifices

Si les sacrifices humains sont les plus impressionnants et sont réputés être les plus importants, dans les faits ils ne représentent qu’une toute petite partie des sacrifices faits aux diverses divinités. En effet il existe tout un ensemble de sacrifices différents. 

Les sacrifices de plantes

Il s’agit ici de bruler une plante particulière (tabac, coca, plantes considérées comme sacrées…) et de baigner l’idole qui reçoit l’offrande avec la fumée. Dans les faits, ce sacrifice est très rare surtout seul. En effet si des plantes interviennent parfois dans divers rites sacrificiels, elles sont bien souvent plus un rôle symbolique ou mystique qu’une réelle valeur de sacrifice. On peut cependant parfois retrouver des sacrifices de plantes à proprement parler dans le cadre de rites rendus à certains tehcualts de petits villages. 

Les sacrifices d’animaux

Les sacrifices d’animaux sont l’une des formes de sacrifice les plus communes mais ils sont aussi souvent moins visibles car réalisés dans le cadre de plus petites cérémonies surtout dans les grandes villes. Pouvant prendre de nombreuses formes (saignée ou égorgement le plus souvent), il n’est pas rare que l’animal soit préparé avant le sacrifice (amené près du lieux la veille, drogué, parfois peint etc…). Selon la nature du sacrifice le sang sera récolté et déversé sur l’idole ou on présentera le cœur à cette dernière. Pour ce qui est des animaux sacrifiés ces derniers sont très nombreux allant de petits rongeurs, lapins etc… à des chevreuils et tapirs en passant par des prédateurs. En revanche les poissons et animaux marins ne sont jamais sacrifiés, de même il est extrêmement rare de sacrifier des animaux à sang froid. Quoiqu’il en soit une croyance commune veut que plus l’animal et grand et dangereux et plus le sacrifice sera considéré comme nourrissant pour les dieux.

Les sacrifices humains

Les sacrifices humains sont souvent considérés comme les sacrifices les plus importants mais sont aussi les sacrifices les moins communs. Hors des grandes villes, il est rare de sacrifier plus d’une personne tous les 2 ou 3 ans et dans les petits villages ceci n’a lieu que dans les périodes critiques ou tout les 5 à 10 ans. Cependant contrairement aux autres sacrifices plus réguliers, ce type de sacrifice est aussi celui donnant lieu à des démonstrations publiques plus impressionnantes avec parfois l’obligation d’y assister. La mise en scène et les implications y sont souvent plus profondes. De plus de par l’objet qui est sacrifié, ces sacrifices sont ceux ayant le plus d’implication politique et après une guerre les sacrifices organisés dans les grandes villes par le vainqueur pourront être bien plus importants et compter plusieurs dizaines voire centaines de personnes en une fois. Certaines cultures comme les akoutlals et oxotllis ne pratiquent presque pas ce type de sacrifice.

Point important concernant ces sacrifices, s’ils peuvent revêtir de très nombreux aspects, il existe parallèlement deux manières de traiter le sacrifié : l’ennoblissement et la déshumanisation.

L’ennoblissement est caractéristique des situations ou le sacrifié est volontaire ou désigné. Dans ce cas la personne qui sera sacrifiée est bien souvent préparée longtemps à l’avance et jouira durant un certain temps de privilèges importants (maison destinée, droit de boire de l’alcool en public etc…), il arrivera souvent qu’elle soit assimilée à une divinité dont elle portera les atours et qu’elle « incarnera » jusqu’au sacrifice. C’est typiquement le cas des sacrifices faisant revivre des éléments fondateurs du monde et pour que le sacrifié soit l’incarnation de la divinité durant le rite, il doit être traité comme tel avant ce dernier. De manière plus légère, cela peut simplement passer par le fait de vêtir le sacrifié de vêtements honorifiques et de lui accorder une fête la veille de son départ. Le but est alors de féliciter la personne pour son choix et de le préparer à sa mort. 

La déshumanisation est surtout pratiquée à l’encontre des personnes capturées au combat. Elle peut prendre de nombreuses formes mais l’idée globale est de retirer à la personne sa peau d’humain pour qu’elle puisse prendre sa peau de sacrifié. De même l’objectif est de leur retirer toute marque visible d’appartenance à un peuple pour les rapprocher des « premiers hommes » qui n’avaient pas de qetec et ne vénéraient pas les patchamas. Parmi ces formes il y a le fait de retirer tout bijou ou vêtement (sauf son pagne) à la personne; le perçage des oreilles juste avant la cérémonie pour y faire passer des bandes de papier ou de coton ; le fait de leur faire une tâche de craie, de cendre ou de terre pour les reconnaitre de loin ; le fait de les décoiffer ; le fait de les obliger à marcher courbé en étant attaché. Parfois les choses vont plus loin avec la coupe de la langue pour les empêcher de parler. A noter que cette déshumanisation n’a généralement lieu que le jour du sacrifice, avant cela les personnes sont souvent correctement traitées et avant le sacrifice on leur donne souvent diverses substances pour réduire la douleur et les rendre plus malléables. 

Les saignées

Les saignées sont de loin les formes de sacrifices les plus communes. Elles consistent dans les faits pour l’officiant ou parfois une autre personne de faire un don de sang à une divinité. Ce don prend de nombreuses formes les plus communes étant de prélever un peu de sang de l’oreille à l’aide d’une aiguille et de le déposer sur de petits morceaux de papier ou de coton qui seront brulés devant la divinité. Ce type de sacrifice de sang est fait de manière journalière par les prêtres et chamans mais peut parfois aussi être fait dans d’autres occasions par les gens du commun, le plus souvent lors de certaines fêtes religieuses. Ce type de petit sacrifice est le plus souvent vu comme peu nourrissant pour les dieux mais aussi comme une nécessité car il trouve son intérêt dans le fait d’être pratiqué massivement par tous les prêtres et chamans chaque jour. De plus il a aussi pour but avoué de rappeler aux prêtres et chamans leur rôle, et aux gens du commun à quel prix ils peuvent vivre dans ce monde.

Hormis ce cas très courant, la saignée sacrificielle peut prendre d’autres formes. Lors de certains rituels, les prêtres et chamans se perceront le corps (cuisse, biceps, langue, nez, pectoraux, pénis…) de diverses aiguilles ou aiguillons de raie et de pratiquer certaines danses. Rite extrêmement douloureux, on pense que le sang obtenu de cette manière satisferait bien plus les dieux. Une autre forme un peu moins extrême consiste à se percer la langue et à y faire passer une cordelette plus ou moins longue contenant de petites aiguilles. Ce type de saignée sacrificielle est surtout pratiquée par les notachapas zacoalts et certains paretches atlecs de manière publique lors de certains grands évènements. Si cela à un rôle religieux, cela peut aussi servir leurs intérêts politiques, les deux affaires étant fortement liées.

Les sacrifices gladiatoires

Le sacrifice gladiatoire est une forme de sacrifice humain très particulier en vogue chez les atlecs et plus rarement chez les zacoalts. Il se pratique uniquement à l’encontre de prisonniers de guerre lors de certaines cérémonies. Il prend  généralement place sur une plateforme où le prisonnier sera attaché à l’aide d’une corde de quelques mètres à une statue ou une grande roue de pierre. Ce dernier devra affronter lors d’un combat un guerrier de métier (souvent guerrier aigle, jaguar ou ara) en étant armé d’une arme dont les lames ont été remplacées par des plumes. Lorsqu’il est trop blessé pour continuer le combat, le prêtre se précipite vers lui et le sacrifie par cardiectomie. Cette mort est vue comme une mort très glorieuse et généralement plusieurs personnes à sacrifier se succèderont sur une journée. Si par chance le prisonnier arrive à mettre hors de combat son opposant, il devra alors faire face à un autre adversaire, puis un autre, et encore un autre. S’il arrive à vaincre 4 ennemis (ce qui est rare), il retrouve alors sa liberté, on le soigne et on lui remet de riches vêtements et de la nourriture. 

L’exécution du sacrifice

Il existe une très grande variété de rites sacrificiels allant des pratiques courantes réalisées à certaines dates et visant à préserver le monde, à des pratiques plus exceptionnelles visant à produire des effets plus spectaculaires et immédiats. S’ils sont très divers dans leur forme, leur signification et leur déroulement on y trouve tout de même certaines constantes.

Le matériel

Le matériel est l’un des éléments qui varie le plus d’un sacrifice à l’autre et pourtant il en est un élément essentiel. En effet quel que soit le sacrifice, le matériel qui est utilisé est déterminé par le rite et l’on pense que l’absence ne serait-ce que d’un élément annulerait tout l’effet de ce dernier. Ainsi la préparation du matériel et de son entretien est l’une des tâches essentielles du prêtre et chaman et dans les grands temples les stocks sont rigoureusement surveillés. 

Parmi les matériaux et outils les plus communs au sacrifice on trouve :

-le couteau sacrificiel : ce dernier est toujours une dague en silex qui est à la fois un symbole de la foudre et de la vie. Cette dague est uniquement dédiée aux sacrifices et est utilisée dans tous les cas où le sacrifice se fait par saignée, égorgement ou cardiectomie. Elle est un élément essentiel de la panoplie de tout prêtre et est parfois richement décorée. 

-l’autel sacrificiel : bien que l’on puisse s’en passer, la présence d’un autel sacrificiel est présent devant ou plus rarement dans tous les temples et proche de tous les lieux de cultes. Pouvant prendre de nombreuses formes il est généralement finement sculpté. Dans sa forme la plus commune il s’agit d’un petit pilier de pierre sur lequel le dos du sacrifice reposera partiellement. A noter que selon les temples on pourra trouver plusieurs autels sacrificiels adaptés à divers types de sacrifices. 

-le/les bols à offrandes : très régulièrement le prêtre aura besoin de bols à offrandes permettant de recevoir le sang ou les cœurs des sacrifiés avant de les amener à l’idole divine. Si n’importe quel contenant peut faire l’affaire, il s’agit généralement de bols dédiés et richement décorés. Lors de grands évènements ou dans les grands temples, on trouve de grandes urnes appelées vases de l’aigle permettant de recueillir les cœurs de plusieurs dizaines de sacrifices. 

-l’encensoir à copal : le copal est une résine jaune partiellement fossilisée utilisée comme encens lors de presque tous les rites. Pour l’utiliser le prêtre allume dans un petit encensoir sculpté ou un bol quelques braises avant d’y déposer la résine qui fondra sous l’effet de la chaleur et produira une fumée épaisse. La croyance veut qu’utiliser du copal lors des rites, au-delà de son aspect symbolique, facilitera l’ascension de la nourriture des dieux. Le copal est d’ailleurs à ce point important pour les prêtres (surtout atlecs, iktomis, cutchakans et zacoalts) que ces derniers portent toujours une bourse contenant du copal sur eux. Cette bourse est d’ailleurs devenu un signe distinctif de leurs fonctions. 

-les objets symboliques : la plupart des autres objets qui seront utilisés dans le rite sacrificiel, même s’ils sont détruits ne seront en fait que des objets symboliques. Ces derniers permettent de recréer symboliquement des situations soit pour en faire part aux divinités, soit, si le prêtre s’assimile à la divinité lors du rite, de les changer symboliquement et donc permet de changer la réalité. Une croyance commune chez de nombreux profanes laisse à penser que ces objets seraient des offrandes mais ce n’est pas le cas. Par exemple le fait de faire bruler du cacao lors d’un rite peut symboliser le fait de rejeter la richesse, mais ce n’est pas une offrande.

L'idole divine

L’idole divine est un élément essentiel à tout rite sacrificiel, prenant de nombreuses formes il est considéré comme une représentation des patchamas ou d’un qetec et a pour rôle de recevoir les sacrifices destinés aux divinités. Particulièrement sacrées elles sont considérées avec un grand respect et sont régulièrement entretenues par les prêtres. De natures très différentes la plupart représentent une unique divinité précise ou l’un de ses aspects mais l’on en trouve aussi représentant plusieurs divinités en même temps. Plus ou moins grandes elles sont le plus souvent gardées au sein des temples et sont sorties lors de certaines occasions même s’il arrive qu’une pièce soit dédiée à une unique idole. 

Dans les faits ces idoles prennent généralement deux grandes formes. La première est celle de statue le plus souvent en bois sculpté à l’image d’une divinité ou d’un de ses aspects. Ces statues sont généralement peintes et parfois vêtues. Bien que régulièrement nettoyées elles portent sur elles les marques de sangs des sacrifices qu’elles ont reçues. L’autre grande forme d’idole divine est le paquet divin. On la retrouve surtout chez les cutchakans, iktomis et dans une moindre mesure certaines cultures zacoaltes. Cette idole prend la forme d’un grand sac de cuir ou de toile épaisse qui n’est jamais ouvert et est tâché de sang du fait des offrandes. A l’intérieur de ce sac se trouvent divers éléments que l’on considère comme des attributs de la divinité qu’il représente notamment des plumes ou os d’animaux, diverses plantes, des pierres, des tissus d’une couleur etc… Bien que d’aspect plus modeste, ces paquets restent extrêmement respectés y compris par les atlecs (qui y voient une version assez primitive des idoles divines). Enfin une forme moins fréquente d’idole divine prend la forme d’un petit poteau de bois ou sont gravées des représentations des diverses divinités, gravures souvent accompagnées d’éléments collés ou incrustés. Ces poteaux sont surtout utilisés par les prêtres itinérants souhaitant pouvoir effectuer leur tâche sans avoir à dépendre d’un temple.

Bien que d’aspect parfois très simples, la confection d’une idole divine est une tâche très longue et complexe. Au-delà de la simple réunion des composants et de sa sculpture (quand cela est nécessaire), sa fabrication est vue comme un long processus de naissance d’environ une année lunaire nécessitant de nombreux rituels (qui dépendent de la nature de l’idole et des croyances du peuple) ainsi que des sacrifices réguliers pour l’aider à prendre vie et ainsi pouvoir transmettre les sacrifices à la divinité qu’elle représente, le dernier étant toujours un sacrifice humain.

La méthode

Le sacrifice et sa méthode dépendent fortement de l’ensemble du contexte rituel, des croyances locales et de la divinité. Chaque rituel est plus ou moins unique et un même rituel peut connaitre des variations plus ou moins grandes en fonction du lieu et de l’époque. Quoiqu’il en soit, pour ce qui est du sacrifice en lui-même, il n’est presque jamais effectué seul (sauf pour les très petits animaux et plantes) pour des raisons pratiques. Généralement le prêtre sera accompagné de deux à quatre assistants qui tiendront le sacrifice quand cela est nécessaire. 

Pour ce qui est des méthodes à proprement parler voici les principales :

-la saignée : pratiquée de diverses manières, mais le plus souvent par égorgement, le but est ici de recueillir l’eau précieuse du sacrifice. C’est la méthode la plus commune pour les animaux, mais aussi divers rituels dédiés à l’eau, la pluie ou les récoltes.

-l’étranglement : pratique très rare, l’étranglement est souvent jugé être un mauvais sacrifice car il ne fait pas couler l’eau précieuse. Il est surtout pratiqué par les akoutlals lors des très rares sacrifices humains.

-la décapitation : ce type de sacrifice touche surtout les humains et certains animaux comme le chien, le coyote ou les grands félins. Dans ce cas on n’utilise pas un couteau en silex mais de grandes haches cérémonielles à tête en pierre polie.

-la cardiectomie : le retrait du cœur est considéré comme la forme de sacrifice la plus pure mais aussi celle faisant le plus d’honneur au sacrifié. Elle n’est utilisée presque que sur les humains et nécessite d’ouvrir le corps à l’aide d’une dague en silex. Bien effectué le cœur palpite encore légèrement au moment du retrait. Ce type de sacrifice se retrouve surtout dans les rites liés aux astres, au soleil, à la lune, au renouveau ou à la terre.

-par perforations : proche de la saignée, le sacrifice sera alors tué en le perçant que ce soit à l’aide d’une dague ou parfois de flèches. Le but est de faire couler l’eau précieuse sur le sol. On retrouve ce type de sacrifice dans deux grands types de rites : ceux liés à la fertilité de la terre (le sang tombe comme une pluie) et ceux liés à la chasse (la victime est assimilée à un animal qui a été chassé). 

-l’écorchement : ce type de sacrifice est plutôt rare et souvent pratiqué en parallèle ou suivant une saignée. Il se pratique sur les grands animaux mais aussi sur les humains. Parfois seuls une partie symbolique de la peau est prélevée parfois elle l’est dans son intégralité. Souvent le prêtre (ou dans certains cas la cible du rituel) va ensuite se vêtir de la peau du sacrifice pour poursuivre le rite. On retrouve surtout ce type de sacrifice dans tous les rites liés au renouveau (on fait littéralement peau neuve). Ainsi il est fréquent dans les rites pour éloigner certaines maladies mais aussi aux rites agraires liés à un changement de saison.

-l'immolation : la cible du sacrifice est immolée par le feu que ce soit partiellement et suivi d’une décapitation/cardiectomie ou totalement. Ce type de sacrifice se pratique surtout durant les rites liés à la guerre, aux passages de saisons ou à la sécheresse.

-la noyade : ce type de sacrifice est plutôt rare la cible étant noyée le plus souvent dans un étang ou un lac.

Le rapport à la cruauté

Les sacrifices sont souvent des rites d’une extrême violence qui au-delà de la mise à mort ont parfois pour but d’infliger la souffrance ou demande d’exercer certaines tâches particulièrement choquantes comme l’écorchement, faire mal pour provoquer des pleurs etc… Il ne faut cependant pas penser que cette souffrance infligée est vue comme une chose banale ou gratuite. Elle répond souvent à un impératif du rite et elle est souvent vue comme un moindre mal ou une chose allant de soi. Si certains prêtres se réjouissent de leur tâche ce n’est pas tant qu’ils se réjouissent d’infliger la souffrance mais plutôt de bien accomplir leur devoir en nourrissant le monde. En revanche hors de ce cadre la cruauté est dans la plupart des cas très mal vu par la majorité des personnes (prêtres compris). Bien qu’il existe des individus déviants, dans la grande majorité des cas les actes de torture gratuits ou même la maltraitance animale sont très gravement punis. La torture, même dans un usage militaire (obtenir des informations) ou judiciaire (faire avouer) est d’ailleurs proscrite et très lourdement sanctionnée si elle est pratiquée. Dans ce contexte les rites et  sacrifices même les plus violents ne sont par contre pas vus comme des exceptions mais bien comme des choses à part ne relevant pas des actes cruels.

Le destin du corps

Une fois le sacrifice terminé se pose la question du destin du corps du sacrifié quand il s’agit d’un animal ou d’un humain. Dans presque tous les cas ce corps est jugé impur et ne doit pas être consommé même s’il existe quelques exceptions.  S’agissant d’un animal, le corps sera le plus souvent incinéré ou enterré si possible le plus loin possible du lieu du sacrifice. S’agissant d’un humain, le corps est le plus souvent traité avec égard en respectant les coutumes du peuple. On trouve toutefois certaines exceptions à cette règle. Dans certains cas des éléments du sacrifié notamment le crâne peuvent être gardés. Ces derniers seront alors exposés sur un râtelier avec d’autres crânes de sacrifiés et serviront à surveiller et protéger symboliquement les lieux. Ces râteliers sont aussi une preuve du « dévouement » du pouvoir en place et une marque de sa puissance. Une autre exception se trouve dans le cas où l’individu est déshumanisé lors du sacrifice. Dans certaines situations, le corps de la personne sera abandonné aux bêtes sauvages, enterré dans un lieu perdu etc… le but est ici de poursuivre cette déshumanisation et de ne pas lui reconnaitre les droits que lui accorderait son peuple. 

Le cannibalisme rituel

Bien qu’il ne s’agisse pas d’un rite sacrificiel à proprement parler, le cas du cannibalisme est une chose assez particulière. En effet de le cannibalisme est le plus souvent vu comme une chose particulièrement mauvaise voire un affront aux qetecs. Cette vision des choses concerne principalement le cannibalisme de subsistance. Cependant il existe des cas ou des formes de cannibalisme rituel sont pratiquées et plus ou moins encouragées. 

-la mort d’un haut prêtre : cette pratique ne concerne que les hauts prêtres de l’empire atlec et les lipotls des cités zacoaltes pochtans, yapanecs et toxcecs. Suite à la mort de ce haut prêtre, celui qui assurera sa succession doit réaliser tout un ensemble de rites dont celui de manger rituellement le cerveau ou parfois le cœur. De même il gardera souvent le crâne de son prédécesseur et le portera durant un temps sur lui. Par ce rituel, il prend non seulement la fonction de son prédécesseur mais aussi s’accapare symboliquement de son savoir et sa puissance. Dans le cas de l’empire atlec, cette cérémonie va plus loin puisque le successeur devra se revêtir de la peau du précédent haut prêtre, devra porter ses vêtements et porter son nom durant un mois lunaire. Il prend ainsi complètement l’identité de celui à qui il succède.

-la capture d’un chef ennemi : cette situation est l’un des rares cas ou une personne sacrifiée pourra être consommée. On retrouve surtout cette pratique chez l’ensemble des peuples zacoalts et plus particulièrement chez les huitzes. Elle est aussi présente chez plusieurs clans tiguis et oxotllis. Suite à un conflit de grande ampleur, lorsqu’un officier ennemi est capturé et s’est montré particulièrement valeureux, non seulement il sera sacrifié sans être déshumanisé, mais de plus le chef des troupes ou le dirigeant local mangera sa cuisse ou son bras en compagnie des guerriers s’étant le plus illustré au combat (officiers ou guerriers ayant fait de nombreux captifs). Participer à un tel repas est considéré comme un grand honneur et la viande est toujours bouillie et cuite sans piment pour éviter que le feu ou le piquant ne la blesse. Chez les zacoalts huitzes les choses vont plus loin puisque le fait de ne pas se nourrir du général ennemi est une manière de lui manquer de respect car on estime ne pas avoir besoin de sa force.

-la réparation d’une dette : ce rituel était surtout présent au sein de la noblesse atlèque et dans une moindre mesure zacoalte pochtane. Lorsqu’une personne a commis une atteinte particulièrement grave envers une famille noble et que les réparations données semblent insuffisantes, l’offensant peut choisir de se donner lui-même en sacrifice à la famille lésée. La famille va alors sacrifier la personne pour leur qetec d’une part et les prendre à témoin de l’acte de rédemption, et d’autre part consommer un peu de sa chair pour officialiser le pardon et honorer le sacrifice. Le cannibalisme de cette coutume tend peu à peu à disparaitre et n’est plus présent que chez les très anciennes familles. 

-le rite de passage : on retrouve des traces de cannibalisme rituel dans divers rites de passage. Par exemple, plusieurs temples de la guerre surtout chez les guerriers aigles et jaguars pratiquent le cannibalisme rituel. Chez les guerriers jaguars il est très commun que lorsque le guerrier apporte son premier captif, il le fasse à la maison de la guerre. Là un prêtre sera demandé pour faire le sacrifice du captif et le guerrier devra en manger un morceau, le plus souvent un morceau de la cuisse qu’il partagera avec ses instructeurs. Chez les guerriers aigles, il est de coutume qu’après la première bataille auquel participe le guerrier avec les membres de sa maison de la guerre, un captif soit tué, cuit et mangé entre les guerriers présents. De manière plus large, plusieurs maisons de la guerre de guerriers aigles et jaguars incitent leur membre à pratiquer le cannibalisme après la première bataille d’une campagne militaire promettant d’être longue. Le but est de s’imprégner la force de son ennemi et en le mangeant de ne plus avoir peur. Si ces pratiques sont officiellement interdites, dans les faits elles sont tout à fait tolérées et certains officiers y participent. On retrouve cette pratique du cannibalisme après la première bataille chez plusieurs clans oxotllis (parfois réduite au chef, parfois à tous les guerriers).

-le cannibalisme chez les oxotllis : Le cannibalisme est une des manières assez différentes chez les oxotllis. S’il n’est pas pratiqué par toutes les cultures, il l’est par un grand nombre d’entre elles mais à des fins différentes. Dans la majorité des cas (mayanos, caniapus, akatsuyos, garapas) il est pratiqué uniquement lors des conflits. Dans ce cas certains individus importants capturés seront tués et mangés par la tribu du vainqueur. Par cet acte, ils sont symboliquement intégrés à la tribu de ceux qui les mangent entrainant avec eux la tribu perdante.  Dans d’autres cultures (pirabas, maras et xibans) les choses vont plus loin car cela concerne aussi ceux qui sont condamnés à mort pour de graves infractions. Vis-à-vis des membres de la tribu cela permet de les réintégrer symboliquement à la tribu malgré leurs crimes, pour les étrangers cela permet à la fois de leur faire payer leurs crimes (mise à mort), de racheter les offenses faites en nourrissant la tribu mais aussi de les intégrer symboliquement à la tribu car ils ont fait amande honorable en la nourrissant. 

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